Mais de quoi parle-ton ? Rien que d’entendre ces mots, le syndrome de l’imposteur, j’ai l’estomac qui se noue et je me sens vaguement coupable. Parlons-en et clarifions ce qu’il y a derrière. Rassurez-vous, ça se guérit ! Ce n’est d’ailleurs pas tant un syndrome, mais plutôt un phénomène. C’est ainsi que les deux psychologues américaines, Clance et Imes l’ont décrit en 1978. Elles le définissent comme un doute maladif sur ses compétences alors que tout prouve le contraire, et le sentiment de tromper son monde.
Petit témoignage perso sur le sujet : je le connais bien, je l’ai vécu à plusieurs périodes de ma vie, et j’en garde un souvenir cuisant !
Témoignage
A 23 ans, fraichement sortie de mes études de psy, je suis embauchée dans une grosse société, au service d’audit interne. Ce service permet de former des jeunes cadres au fonctionnement de l’entreprise. Il sert de réservoir de jeunes cadres pour évoluer ensuite vers d’autres fonctions. Les auditeurs sont tous ingénieurs ou commerciaux de grandes écoles. Je suis la seule de mon espèce en terme de formation.
Mes premières missions sont un calvaire : je ne comprends rien, je n’ai rien de commun avec les autres, je me sens différente, incompétente, pas à ma place. Je vomis tous les matins en allant au travail, j’ai des sueurs froides, je suis inhibée, anxieuse. Je vis dans l’angoisse que mes collègues et mon chef se rendent compte que je suis nulle, pas intelligente. Un calvaire ! Et pourtant, je sais et ils savent que mon recrutement est une expérimentation : ouvrir le recrutement de ces auditeurs à d’autres profils.
Mais ma raison est impuissante à combattre ce sentiment d’illégitimité très inconfortable : la sensation de tromper mon entourage, alors même que mon plus grand souhait est de bien faire. Mon supplice dura 6 mois, le temps de passer à une nouvelle mission plus en adéquation avec ma formation.
Pourquoi parler de syndrome de l’imposteur dans cette situation : parce que je me sentais incompétente, et je l’étais, mais comme tous les autres. Sauf que j’avais le sentiment très fort de ne pas être à ma place, de ne pas être capable : on appelle ça des croyances négatives ou croyances limitantes. Elles nuisent fortement à notre estime de soi et minent notre confiance en soi. En parallèle, j’idéalisais les autres, les trouvant plus compétents que moi.
Les déclencheurs de cette peur dans cette situation venaient :
- de me sentir différente des autres
- de mon tempérament plutôt anxieux et soucieux de bien faire
- d’être dans mon premier travail et dans une mission où j’avais tout à apprendre.
Dix ans plus tard, installée à mon compte en libéral, je me lance dans le coaching et les bilans de compétences. Je décroche mon premier client, une entreprise qui me commande 8 bilans pour ses collaborateurs. Je m’étais formée à ce type d’accompagnement en benchmarkant différentes pratiques, mais sans passer par un diplôme ou une formation académique (qui n’existait pas d’ailleurs). A nouveau, je retrouve mon démon, le syndrome de l’imposteur, dans la phase de démarrage. Cette fois-ci les effets sont moins intenses et s’estompent au fur et à mesure de ma pratique. Les retours positifs que j’obtiens, me permettent de prendre confiance, et de mieux me rendre compte de ce que je réussis, de ce que je peux améliorer et des erreurs. Je deviens plus nuancée.
Caractéristiques du syndrome de l’imposteur
Ceux qui souffrent de ce syndrome cochent souvent plusieurs de ces caractéristiques mais pas toutes :
- le fonctionnement en mode binaire : « je suis compétent ou incompétent »; « j’ai réussi ou j’ai échoué ». Il n’y a pas de prise en compte positive de l’erreur, pas de notion d’évolution ou de progrès. On imagine que l’on doit tout savoir, tout maitriser tout de suite, avoir réponse à tout. Et en cela, c’est très déconnecté de la réalité.
- Une forte anxiété, une peur de l’échec avec des sensations physiques très envahissantes
- Une peur d’être rejeté si on échoue, ou si on fait une erreur
- La croyance que je n’ai pas mal place
- La croyance que je ne suis pas capable, ou que je suis nul ou pas intelligent
- Lorsque je réussis, la peur de ne pas être capable de réussir de nouveau et donc d’être démasqué. Cela peut générer la peur de réussir et provoquer de l’auto-sabotage
- Une tendance à la dévalorisation
- Le sentiment de tromper les autres qui s’accompagne de honte et d’angoisse
- Une mauvaise attribution de ses succès ou de ses échecs. Si je réussis, ce sera grâce au hasard ou à la chance, donc à des facteurs externes. Si j’échoue, c’est forcément parce que je ne suis pas capable, tout est de ma faute, donc à des facteurs internes.
- Du mal à accepter les compliments puisque je ne m’attribuent pas mes réussites
Les scénarios mis en place
On observe en général l’une de ces deux stratégies quand on vit le syndrome de l’imposteur :
- la procrastination ou l’auto-sabotage : par exemple : j’ai un examen à passer, mais j’ai tellement peur de l’échec, que je le provoque avec une raison plus acceptable à mes yeux. Je procrastiner, je ne révise pas mon examen.
Je peux aussi éviter la situation : rater le train, tomber malade … tout plutôt que de risquer d’être en échec et montrer au monde que je suis nulle, pas intelligente… Car alors les autres me rejetteraient. - le travail frénétique : c’est une autre stratégie. Je sais que je ne suis pas compétente et donc je dois travailler dix fois plus que les autres pour prouver ma légitimité. Le travail est obsédant et stressant, il m’épuise. Mais en général je suis très apprécié dans mon travail.
Pour mieux comprendre votre scénario,
Les causes
Il y a plusieurs explications possibles. L’éducation peut jouer un rôle.
- un environnement familial qui survalorise l’enfant : l’enfant intègre qu’il est parfait et donc il n’a pas le droit à l’erreur
- à l’inverse, un environnement familial qui dévalorise fortement l’enfant. Il n’arrive pas à développer de l’estime de soi ni de confiance en soi. Il n’a pas conscience de ses capacités.
- Soit un environnement familial qui survalorise ou sous valorise l’enfant, et un autre environnement qui fait l’inverse. Par exemple l’enfant est sous valorisé à la maison mais très valorisé à l’école. Il ne sait alors comment s’évaluer et n’intègre pas la capacité de s’évaluer à sa juste valeur, il est perdu
- enfin les profils à haut potentiel pour certains, ont le sentiment de ne pas être compris, notamment dans l’enfance et à l’école, leurs compétences ne sont pas toujours reconnues et l’enfant ne va donc pas intégrer un sentiment de confiance.
- Les premières fois que l’on fait quelque chose, sont des étapes propices pour déclencher ce sentiment. Mais cela s’atténue ensuite si on développe une bonne estime de soi et qu’on se rend compte des progrès et des compétences que l’on acquiert.
- Un tempérament anxieux, très soucieux de bien faire
Pour mieux comprendre votre syndrome de l’imposteur
Pour sortir du syndrome de l’imposteur
- S’informer et s’auto-diagnostiquer en faisant le test de l’échelle de Clance sur internet
- Analyser les situations où j’ai ce sentiment d’imposture et distinguer les faits de mes ressentis. Observer comment il s’exprime, dans quelle situation, quelles émotions je ressens, quelles sensations physiques, les mots négatifs que je me dis sur moi
- Parler à son entourage de ce sentiment, sortir du silence
- Utiliser des outils de développement personnel pour raffermir son estime de soi. Par exemple avoir un carnet où lister tout ce que j’ai réalisé, mes réussites. Et le relire quand je doute de moi.
- Et si cela dure depuis longtemps et que vous avez le sentiment d’être bloqué, l’EMDR est une technique très efficace pour en venir à bout. Le principe est de traiter les souvenirs où se sont installés ces croyances négatives sur soi.
Si vous souhaitez vous libérer de votre syndrome de l’imposteur
Et rappelez-vous qu’un vrai imposteur ne se pose pas la question de savoir s’il est légitime et n’a aucun état d’âme à tromper son monde, ni peur, ni honte.
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